L'expression
« prêtre-ouvrier »
Le
début ? En mai 1943 dans Cité
nouvelle, Antoine Lestra - un écrivain
par ailleurs fort traditionnel - utilise
le mot « Un prêtre-ouvrier.
Le P. Boisard, fondateur des ateliers
d'apprentissage ». La revue est
alors publiée à Lyon, par
des jésuites, comme une sorte de
substitution aux publications arrêtées
à la suite de l'Occupation, Études,
et la Revue de l'Action populaire. Les
« Ateliers de l'abbé Boisard
» existent toujours, renouvelés.
Ils sont nés au début du
xxe siècle, comme une sorte d'entreprise
d'insertion à l'intention de jeunes,
Boisard participant lui-même à
la vie de l'entreprise. Antoine Lestra
développera son article dans un
livre de 1949 (Paris et Lyon, Éd.
Lardanchet), portant à nouveau
le mot dans son titre Le Père Boisard,
prêtre-ouvrier, mais alors l'auteur
écrit : « Aujourd'hui de
nombreux prêtres dévorés
de zèle se font ouvriers pour mieux
adapter leur apostolat de conquête
au milieu des travailleurs manuels »
(p. 294). Émile Poulat, dans l'introduction
au Journal d'un prêtre d'après-demain
de l'abbé Calippe (Tournai et Paris,
Éd. Casterman, 1961, p. 139-140)
cite le livre, et non l'article plus ancien
; mais il indique (note 105 p. 140) que
Lestra lui aurait confirmé que
Boisard utilisait l'expression dès
1901. Ce qui ferait penser que ce n'est
pas Lestra qui a créé l'expression,
mais en l'utilisant dans le titre d'un
article, et cela dans une revue relativement
bien connue parmi les prêtres et
militants, il a pu contribuer à
la mettre en circulation. Il pourrait
en tout cas avoir préparé
la voie à la revue Études
qui publia dans les trois premiers numéros
de 1945, la première version (il
y aura ensuite un livre) du Journal d'un
prêtre-ouvrier en Allemagne de Henri
Perrin, alors jésuite [1].
[1]
Voir É. Poulat, Naissance des prêtres-ouvriers,
première édition, 1965,
p. 15-17 dans la Bibliographie, et texte,
p. 334 s.
source: http://www.esprit-et-vie.com
Prêtre-ouvrier insoumis
Historique
En 1942, la France est occupée.
A l'intérieur de l'Eglise se développe
une prise de conscience de la déchristianisation
de la population ouvrière des villes
industrielles alors que la Jeunesse ouvrière
chrétienne (JOC) poursuit clandestinement
son activité. Deux aumôniers
jocistes de la région parisienne,
Henri Godin et Yvan Daniel, écrivent
France, pays de mission?. Le point d'interrogation
ajouté pour ménager la hiérarchie
catholique est remplacé dès
le deuxième tirage par un point
d'affirmation. Ce livre est le constat
d'échec de la JOC pour faire tomber
le mur qui sépare la classe ouvrière
de l'Eglise. Il préconise pour
pallier l'absence de l'idée chrétienne
dans le monde ouvrier que le prêtre
français engage dans son pays une
action qui serait véritablement
missionnaire en épousant la condition
ouvrière. C'est alors que les évêques
décident la création d'un
séminaire où seront formés
des prêtres préparés
à vivre en équipe dans des
secteurs déchristianisés.
C'est la Mission de France.
La
Mission de France est un corps sacerdotal
régulier "destiné non
seulement à apporter l'appui d'un
renfort numérique aux diocèses
les plus dépourvus, mais à
accomplir la mission apostolique du sacerdoce
dans les secteurs les plus déchristianisés,
tant géographiques que sociologiques
par un clergé missionnaire spécialement
préparé aux problèmes
du monde contemporain". Le chanoine
Augros, sulpicien, ancien supérieur
du séminaire d'Autun organise à
Lisieux le séminaire de la Mission
de France. Les prêtres qui y sont
formés partent dans les diocèses
où les évêques sont
demandeurs. Bouleversé par la lecture
de France, terre de mission, le cardinal
Suhard procède à la création
d'une équipe qui partira en mission
dans la classe ouvrière parisienne.
C'est la Mission de Paris fondée
le 1er juillet 1943. L'abbé Hollande,
ancien curé de Polangis en est
nommé supérieur. Cette mission
est placée sous l'autorité
directe de l'archevêque de Paris
et compte à sa naissance 7 membres
(25 en 1953). L'équipe de la Mission
de Paris plus importante et plus diversifiée,
devient un peu le centre de référence
des provinciaux. De 1944 à 1946,
des équipes se constituent à
Lyon, au Havre, à Marseille, à
Limoges, à Saint-Etienne, à
Bordeaux ainsi que celle dite des Barrages
dans les Alpes.
Les
prêtres ouvriers découvrent
la vie ouvrière, les grèves
en particulier celles de 1947, le compagnonnage
avec les militants de FO, de la CGT et
du PC, les manifestations comme celle
organisée à Paris le 28
mai 1952 par le mouvement de la Paix où
deux prêtres ouvriers sont victimes
de violences de la part des forces de
l'ordre. En 1947, ils sont une quarantaine
et quelques années plus tard en
1954 une centaine.
Le
séminaire de la Mission de France
est transféré en 1952 de
Lisieux à Limoges et il est fermé
en septembre 1953. En effet, le 23 septembre
1953, Mgr Marella, nonce, informe le cardinal
Liénart de la décision du
Vatican d'arrêter l'expérience
des prêtres ouvriers. "Ils
sont un scandale pour les chrétiens
et ils font courir un grave péril
à l'Eglise". Il est donc ordonné
aux prêtres ouvriers de quitter
le travail et tout engagement syndical
et de reprendre la forme traditionnelle
du sacerdoce.
Une
cinquantaine choisissent de ne pas obtempérer.
Ce sont les insoumis. Certains de ces
insoumis se regroupent autour de Bob Lathuraz
et prennent l'habitude de correspondre
et de se réunir plusieurs fois
par an. Ce groupe a vécu dans l'ombre,
mettant en commun leurs réflexions
sur les événements de la
vie ouvrière et les engagements
qu'ils y vivaient, sur leur état
de tension avec l'institution Eglise qui
les avait condamnés et sur leur
vie spirituelle gardant sa source d'inspiration
dans l'Evangile.
A
la mort de Bob Lathuraz en 1993, ce groupe
réunissait encore Aldo Bardini
domicilié à Bagnolet (93),
Bernard Chauveau domicilié à
Saint-Valérien (89), Maurice Combe
domicilié à Saint-Etienne
(42), Jean Cottin domicilié à
Pommerit-le-Vicomte (22), Jean Gray domicilié
à Auxerre (89), Jean-Marie Huret
domicilié à Valmont (76)
et Jean Olhagaray domicilié à
Hasparren (64). Ce dernier a appartenu
à la Mission de Paris et entreprend
actuellement un travail pour retrouver
les anciens de la Mission de Paris et
recueillir leurs témoignages.
Le
concile Vatican II, en 1965, autorise
de nouveau l'expérience des prêtres
ouvriers qui sont en 1993 près
de 600 dont la moitié à
la retraite. Mais il est recommandé
alors aux nouveaux prêtres ouvriers
de demeurer hors du sillage des insoumis
dont l'histoire est occultée jusqu'en
1990. Ils sont, à cette date, enfin
invités à participer à
une réunion nationale des prêtres
ouvriers.
source:
http://www.archivesnationales.culture.gouv.fr
Bibliographie
Huret
(Jean-Marie)
Prêtre-ouvrier insoumis.- Editions
du Cerf, 1993
Leprieur
(François)
Quand Rome condamne.- Editions du Cerf,
collection "Terre humaine",
1989
Debès
(Joseph)
Naissance de l'action catholique ouvrière.-
Editions ouvrières, collection
"Mémoires du futur",
1982
Vinatier
(Jean)
Les prêtres-ouvriers, le cardinal
Liénart et Rome. Histoire d'une
crise, 1944-1967.- Editions ouvrières,
1985
Rollet
(Henri)
Le travail, les ouvriers et l'Eglise.-
Fayard, collection "Que sais-je ?"n
103, 1959
Siefer (Grégor)
La mission des prêtres-ouvriers.
Les faits et les conséquences.-
Edition de l'Epi, 1963
Pierrard (Pierre)
L'Eglise et les ouvriers en France (1940-1990).-
Hachette,1991
Declercq
(Maurice)
Au service de l'apostolat ouvrier, l'abbé
Marcel Hardeman, 1907-1940.- Le Roux,
1953
Mayeur (J.M.)
Un prêtre démocrate : l'abbé
Lemire (1853-1928).- Casterman,1968
Pierrard
(Pierre)
L'Eglise et les ouvriers en France (1940-1990).-
Hachette, 1991
source: http://www.archivesnationales.culture.gouv.fr
1954 et les prêtres ouvriers:
1er mai 2004:
message du MMTC
Mouvement Mondial des Travailleurs Chrétiens
C'est l'histoire
d'un immense gâchis.
Une histoire triste mais palpitante racontée
par ceux-là mêmes
qui se sont trouvés pris au milieu
de la tourmente.
Au lendemain
de la Seconde Guerre mondiale,
une centaine de prêtres catholiques
français décidèrent
de partir en mission pour évangéliser
le monde ouvrier,
largement déchristianisé.
Ils se firent pour cela prolétaires,
ils en épousèrent le mode
de vie, les luttes et l'engagement syndical,
le plus sou- vent aux côtés
des communistes.
Rome, sympathisante
au départ, s'en effraya rapidement
alors que s'installait la guerre froide,
et finit par condamner le mouvement.
C'était il y a tout juste cinquante
ans. Avant le 1er mars 1954,
ces prêtres devaient avoir quitté
l'usine ou l'atelier et rejoint les paroisses
traditionnelles.
Pour ces hommes, totalement dévoués
à leur mission, l'injonction de
Rome fut déchirante...
Avec de nombreuses
images d'archives,
ce documentaire retrace l'aventure de
ces hommes exceptionnels,
en leur donnant très largement
la parole.
Qu'ils aient obéi à l'Église
ou qu'ils aient fait le choix de l'insoumission,
leurs témoignages sont particulièrement
émouvants.
Au-delà
du drame humain, on retiendra la beauté
du message spirituel.
Laurent Grzybowski
source: http://catholique-arras.cef.fr
Déclaration de l'équipe
nationale des prêtres-ouvriers,
pour le 1er mars 1954, Date anniversaire.
Le
1er mars 1954 Rome impose aux prêtres-ouvriers
de quitter les usines et les chantiers.
Cette
décision avait pour motivation
affichée: «L'incompatibilité
de la condition ouvrière avec l'état
de vie du prêtre. » Elle brisa
des hommes en les obligeant à faire
un choix impossible entre deux fidélités:
la fidélité à l'église
et la fidélité à
la classe ouvrière.
Elle
fit scandale parmi les militants la classe
ouvrière, les femmes et les hommes
qui travaillaient avec eux, laïcs
et prêtres engagés, luttant
pour la dignité et la justice.
Ce fût pour eux une trahison.
Il
faudra attendre le concile Vatican Il
et l'année 1965 pour que de nouveau
des prêtres puissent retourner partager
la condition ouvrière par le travail
salarié.
Une
centaine de premiers prêtres-ouvriers
ont vécu ce drame. Quelques uns
sont encore vivants. Ils sont notre histoire,
nos racines à nous les prêtres-ouvriers
d'aujourd'hui. Sans eux, sans leur souffrance,
leur espérance, nous n'existerions
pas.
En
ce mois de mars 2004, nous voulons les
remercier d'avoir ouvert la voie.
Aujourd'hui,
cette histoire continue. Nous sommes plus
de 500 en France et à l'étranger
à vivre ce ministère de
prêtres-ouvriers.
Le
partage de la vie, par le travail salarié,
par l'habitat dans les cités, est
pour nous toujours d'actualité.
Il
y a aussi les luttes quotidiennes dans
les organisations syndicales, politiques
et associatives.
La
solidarité avec les précaires,
les exclus, tous les laissés pour
compte est une priorité.
Nous
les prêtres-ouvriers d'aujourd'hui
avec nos anciens voulons témoigner
que l'homme, celui que la société
rend insignifiant, a toute sa dignité.
Qu'il est aimé de Dieu, de Jésus
Christ et cela contre tous les systèmes
qui nous réduisent à n'être
que des marchandises.
Nous
voulons que ce "signe" prêtre-ouvrier
d'une église au service de l'humanité
continue.
«
Quand la mémoire est morte, disait
Péguy,
c'est l'espérance et l'avenir qui
sont mutilés. »
(Citation d'André Depierre dans
un courrier de février 2004)
Déclaration
de l'équipe nationale des prêtres-ouvriers
adoptée le dimanche 22 février
2004 à Issy les Moulineaux à
l'unanimité.
source:
http://catholique-arras.cef.fr
1954-2004 - Cinquantième
Anniversaire de la condamnation des prêtres
ouvriers
Il
y a cinquante ans, ces quelques hommes
qu’on appela les prêtres ouvriers
connurent une fin brutale de leur mission
par le diktat (ultimatum) de Rome. Ils
devaient, au premier mars 1954 avoir quitté
usines ou chantiers où ils travaillaient,
abandonner syndicat et responsabilités
pour rejoindre l’une ou l’autre
des structures ecclésiastiques
paroisses, aumôneries, congrégations.
Il faut reprendre quelques événements
de ce demi-siècle pour comprendre
ce qui s’est passé.
Les
évêques. français,
dans leur majorité, ont apporté
une caution plus ou moins active au gouvernement
du maréchal Pétain, conformément
à une tradition de soumission au
pouvoir établi.
Un
livre du Père Godin “La France
pays de mission” qui pose des questions
à l’Eglise paraît dans
un contexte historique tourmenté,
La guerre finie, après l’occupation,
la captivité, la résistance,
la France vit une libération comme
un temps de reconstruction et d'initiatives
dans tous les domaines.
—
A la tête du diocèse de Paris-banlieue,
le cardinal Suhard était un des
plus éminents représentants
de la hiérarchie catholique en
. France. Tourmenté devant ses
responsabilités pastorales et angoissé
devant l'indifférence du peuple
des banlieues, il se sent le devoir de
faire quelque chose pour abattre le mur
qui sépare ce peuple de l'Eglise.
Sous son impulsion, se constitua un groupe
de jeunes prêtres qui partageaient
la même conviction. Il les réunit
et, fait exceptionnel dans.1’Eglise,
il 1es envoya sans esprit de retour dans
le monde des travailleurs pour .y vivre
une présence d’Eglise. Il
leur concédait une liberté
totale dégagée de toute
obligation. Ils devaient seulement lui
rendre compte:de leurs difficultés
et découvertes, sachant bien que
leur sacerdoce ne pourrait s'y exercer
de façon traditionnelle. L’équipe
de la Mission de Paris était fondée.
Le cardinal venait souvent rue Ganneron
où se réunissait cette équipe
chaque semaine: il ne se privait pas de
se faire l’écho des inquiétudes
de Rome et de ses positions conservatrices.
Ce
qui s’imposa très vite à
ces hommes, ce fut la nécessité
d'entrer au travail et d’acquérir
une compétence professionnelle.
Ils vécurent la vie ouvrière
autrement qu’ en observateurs. Ils
la retrouvaient dans les quartiers ou
les hôtels meublés où
ils s’installèrent. Cette
présence qu'il voulait sincère
et vraie les entraîna normalement
dans les luttes que le prolétariat
est contraint de mener. Ils adhérèrent
à la CGT syndicat que la classe
ouvrière s’est créé
au fil de son histoire et acceptèrent
les responsabilités qui leur y
furent confiées.
C’est
à partir de juillet 1949 qu’un
premier décret du Saint Office
met en garde les catholiques vis à
vis du Parti Communiste. C’est déjà
une condamnation de l'engagement dans
la classe ouvrière. De juillet
1949 à novembre 1953, les manœuvres
vaticanes relayées par une partie
de l’épiscopat français
soumis à l’autorité
du pape Pie XII, ne cessent d’enrayer
cette ouverture à un monde athée.
A noter également
l'offensive
coordonnée des patrons dits chrétiens,
de la C.F.T.C et des milieux les plus
conservateurs de l’Eglise. La découverte
progressive de l’existence de la
Mission de Paris et de ses engagements
provoqua méfiance et scandale.
Après la mort du cardinal Suhard
et dès 1951-52, suspicions, menaces
d’excommunication même, se
manifestèrent de la part de la
hiérarchie. En novembre 1953 est
prévue la décision d’arrêter
" l’expérience"
des prêtres ouvriers suivant l’expression
des non-engagés mais qui pour eux
n’était pas une "expérience".
La
méfiance de la hiérarchie
se manifesta alors par une série
d’interdictions et de mesures répressives
: interdiction du périodique "La
Quinzaine”, condamnation de “Jeunesse
de l’Eglise”, démission
contrainte du père Augros, supérieur
du séminaire de la Mission de France
de Lisieux et fermeture de celui ci, réduction
au silence du père Teilhard de
Chardin.
C’est
ainsi que tomba en 1954 l’interdiction
sans appel de Pie XII concernant les prêtres
ouvriers. A une date précise, ceux-ci
devaient avoir, quitté le , travail
et l’engagement dans la classe ouvrière.
Sur la petite centaine qu’ils étaient,
un peu plus de la moitié décida
de rester au travail. L’événement
eut un certain écho dans l’actualité
d’alors. Pour ceux-la qui en étaient
les principales victimes, une vie nouvelle
commença. Qu’ils soient organisés
dans un groupe de résistance et
de réflexion ou qu’ils se
retrouvent avec leur solitude et leur
conscience, tous vécurent pendant
un an ou deux une véritable traversée
du désert. Deux en perdirent la
vie de désespoir.
—
Mais ce rejet qu’ils avaient subi
et non voulu renforçait leur lien
avec la classe ouvrière. Bien vite,
leur engagement les jeta au coude à
coude avec leurs compagnons de travail,
dans une participation active aux luttes
nées des événements
: conflits sociaux et politiques, guerres
d’Indochine et d’Algérie.
—
Apparaissent alors ces valeurs qui font
l’étoffe et la grandeur de
la classe ouvrière: solidarité
dans la vie et le travail, une dignité
souvent blessée mais toujours revendiquée
et surtout l’appel à une
justice, bafouée par ceux qui ont
pouvoir et argent. Appel à une
justice qui se veut un droit et non à
une charité humiliante.
—
A ces hommes prêtres soucieux d’être
attentifs à l’Evangile plutôt
que d’exercer une fonction traditionnelle
sacralisée, il apparut que la vie
ouvrière était traversée
parles valeurs évangéliques
révélatrices de valeurs
humaines. Ce message que les prêtres
ouvriers pensaient apporter; il leur était
ainsi retourné, vivant, et d’une
vie humaine ~. mais. non sclérosé
dans une doctrine dogmatique et une morale.
Nous avons vécu cet aller et retour
de la pensée à la vie et
de la vie à la pensée comme
une unité retrouvée, une
unité brisée par tous ceux
à qui elle faisait peur.
C’est
à la lumière de cet évangile
vécu que nous avons relu le texte
écrit de cet évangile; il
nous est alors apparu éclatant,
dans une vérité aussi forte
que simple et régénérée.
—
Les années ont passé. Des
prêtres ouvriers d’alors,
une large majorité est disparue.
Nous n’osons pas nous dire les porte-parole
de ceux là. Le rôle de ceux
qui restent est de tenir éveillé
leur souvenir et de tenter d’exprimer
la signification de leur choix et de celui
de tous.
En
guise de conclusion, à la lumière
de notre vécu situé dans
l’histoire du 20ème siècle
héritier du 19ème, une constatation
s’impose à nous : l’incapacité
pour l’Eglise institutionnelle d’accepter
les autres cultures et la volonté
de l’homme de s'inscrire libre et
responsable, dans la construction du monde.
Après avoir éliminé
tout ressentiment, nous pouvons dire que
ces années nous ont apporté
la paix.
le 15 janvier 2004
Adresse : Jo Pichon 0éme Anniversaire,
23 rue des docteurs Charcot, 42100 St
ETIENNE Aida Bardini , Maurice Combe ,
Jean Dessailly , Jean Marie Huret , Jean
Marie Marzio , Jean Olhagaray
source: http://perso.wanadoo.fr/chretiens.daujourdhui
DECLARATION DE L’EQUIPE
NATIONALE DES PRETRES OUVRIERS
Le
monde change, les inégalités
s ‘accentuent.
Vivant au jour le jour sur nos lieux de
travail et dans nos quartiers, nous observons
que les conditions de vie d’un grand
nombre de gens se détériorent.
Nous
rencontrons des hommes et des femmes qui
vivent la précarité, le
chômage, le stress journalier. Financièrement
la vie est de plus en plus difficile:
les salaires ont du mal à suivre
le coût de la vie ; la durée
d’indemnisation du chômage
a été revue à la
baisse
Des usines ferment et licencient le personnel;
la production est transférée
dans des pays ou la main-d'œuvre
est bon marché et sans défense.
La
notion de service public est remise en
cause au nom de la concurrence et de la
rentabilité. Participant activement
à la vie associative, nous sommes
confrontés à la baisse des
subventions. Là encore ce sont
les personnes en grandes difficultés
qui sont les principales victimes.
Des
étrangers, obligés de fuir
leur pays pour des raisons politiques
ou économiques, arrivent en France,
espérant trouver des conditions
de vie meilleures. Ils sont laissés
dans la misère et sans papier sous
la menace permanente d’être
expulsés
D’un coté l’impôt
sur la fortune est diminué ainsi
que l’impôt sur le revenu,
et d’un autre les taxes et les prélèvements
ont augmenté pour tous.
Des reformes en trompe l’œil.
Le gouvernement en accord avec le MEDEF
propose de grandes réformes. Pour
mieux les faire passer dans l’opinion,
il met en avant la solidarité.
C’est
ainsi que prenant appui sur l’allongement
de la durée de vie et l’augmentation
plus rapide du nombre des retraités
par rapport aux actifs, il passe la durée
de cotisation de 40 ans à 42 ans
en 2008. D’autres mesures moins
spectaculaires sont prises pour diminuer
les pensions de retraite.
Un
jour férié (lundi de Pentecôte)
est supprimé pour financer les
personnes âgées en grande
dépendance.
Alors
que le nombre de chômeurs s’accroît
de manière importante, une campagne
de remise en cause des 35h est organisée
par le MEDEF et le gouvernement.
Tandis que la part de la richesse nationale
versée au capital ne cesse d’augmenter,
diminuant par là même. celle
versée au travail, les salariés
sont poussés à faire des
heures supplémentaires et à
capitaliser pour améliorer leur
revenu.
D’autres
réformes sont prévues dans
les mois qui viennent ; la "sécurité
sociale", régime maladie,
est dans le collimateur et déjà
de nombreux médicaments ne sont
plus remboursés; le forfait hospitalier
est augmenté. Là encore
ce sont les plus faibles qui vont être
pénalisés. Une société
à deux vitesses se met en place
: les riches s’enrichissent et les
pauvres sont laissés de coté.
Tout
ceci n‘est pas du à la fatalité.
Nous assistons à une volonté
politique de mettre en place une société
libérale, dont les moteurs sont
la loi du marché et la réussite
individuelle. La solidarité et
la justice ne sont plus que des paravents
pour masquer la réalité.
Un peuple en lutte.
Au printemps des manifestations, comme
on en a peu vu depuis 1968, ont mobilisé
des foules, pour la défense des
régimes de retraite, et pour que
l’éducation nationale ait
les moyens nécessaires pour assumer
sa tache dans les meilleures conditions.
Beaucoup d’entre nous ont pris une
part active dans ces mouvements.
Mais
devant la complexité des problèmes,
les organisations syndicales ont des analyses
différentes : les divisions syndicales
sont toujours mal vécues par les
travailleurs.
Mais
des signes d’espérance apparaissent
: des pays pauvres commencent à
s’organiser; la mise en
échec des propositions des pays
riches lors de la réunion de l’OMC;
les forums sociaux (mondial ou européen)
au travers de nombreux débats,
font émerger l’idée
qu’un autre monde est possible
Comme
citoyen nous dénonçons l’accélération
de la mise en place d’une société
ultra-libérale dont le seul objectif
est le profit maximum pour le pouvoir
financier.
Nous
affirmons qu’une autre société
est possible où l’homme sera
au centre. Une société où
personne ne sera exclu, où chacun
aura un travail, un logement, une protection
sociale digne de ce nom.
Chrétiens,
la lutte pour la justice fait partie de
notre foi.
Dieu a créé l’homme
et lui a donné la responsabilité
d’aménager la terre pour
que chaque être humain puisse y
vivre dignement, en paix, dans la liberté,
et à l’abri du besoin. Cette
terre appartient à tous, et tous
doivent pouvoir s’y épanouir.
Jésus,
le Fils de Dieu, s’est fait l’un
d’entre nous. Il a vécu,
à son époque, en dénonçant
les abus de pouvoir et les injustices.
Il a pris en considération ceux
qui étaient exclus pour les réinsérer
dans la société. Il a toujours
eu une affection particulière pour
les plus pauvres. Il a été
mis à mort parce qu’il gênait
les riches et les puissants.
Comme
Prêtres ouvriers, avec d’autres
chrétiens présents et actifs
dans différentes organisations,
c’est en disciple de Jésus
Christ qu’aujourd’hui nous
dénonçons les injustices.
Nous voulons à son exemple lutter
pour que chacun puisse vivre dignement,
et avoir sa place au milieu des autres.
Pour
cela nous voulons que tout homme prenne
conscience qu’il n’est pas
seulement un consommateur, mais un acteur
indispensable et capable d’agir
pour le bien de tous. C’est tous
ensemble, dans nos organisations, que
nous pourrons promouvoir un monde où
règnera la paix, la justice, l’amour.
Le
7 décembre 2003
L’équipe
nationale des Prêtres Ouvriers.
source: http://perso.wanadoo.fr/chretiens.daujourdhui
Les
prêtres-ouvriers se souviennent
Trois
déclarations honorent chacune à
sa manière le travail des prêtres-ouvriers
et de tous ceux qui assurent une présence
missionnaire auprès des pauvres
et des petits
50
ans après, l’Église
de France se souvient… Elle se souvient
de ce 1er mars 1954, où une décision
romaine mettait fin, du moins provisoirement,
à l’existence des prêtres-ouvriers.
Une aventure commencée au lendemain
de la deuxième guerre mondiale
se voyait ainsi stopper dans son élan
et dans sa dynamique. Cet anniversaire
a été l’occasion de
trois déclarations significatives.
-
Dans une déclaration du 26 février
2004, sobrement intitulé «A
l’occasion d’un anniversaire»,
Mgr Jean-Louis Papin, évêque
de Nancy, et Mgr Jacques David, évêque
d’Evreux, au nom du Comité
épiscopal pour la mission en monde
ouvrier, reviennent longuement sur l’histoire
des prêtres-ouvriers, et élargissent
leur réflexion à la nécessaire
présence de l’Église
dans les quartiers, les cités et
les banlieues.
«Ce
1er mars 1954 restera une date douloureuse
dans l’histoire des relations entre
l’Église et les travailleurs,
y compris pour ceux qui n’ont pas
été les témoins directs
de cet événement qui en
ont entendu parler, reconnaît la
déclaration. Une telle décision
a laissé de graves blessures dans
la vie des personnes concernées
et a porté un rude coup à
l’annonce de l’Évangile
en monde ouvrier, renforçant dans
l’opinion publique l’image
d’une Église davantage liée
aux puissants et aux riches qu’à
ceux qui sont en bas de l’échelle
sociale.»
Les
raisons de la décision romaine
furent multiples. Le Comité épiscopal
ne les évoque pas toutes, mais
relève un point essentiel, qui
peut servir de leçon. «L’aventure
des prêtres-ouvriers n’était
pas portée par tous, analyse le
document. Or des efforts apostoliques
aussi vitaux ne peuvent tenir que s’ils
sont voulus et soutenus par l’ensemble
des partenaires de la mission en monde
ouvrier et, plus largement, par les Églises
diocésaines…» «Aujourd’hui,
poursuivent les évêques,
nous mesurons la fécondité
des efforts alors engagés et des
vies données pour l’annonce
de l’Évangile… Mais
il reste bien du chemin à faire
pour que l’Évangile soit
reçu comme Bonne Nouvelle par ceux
qui en sont les premiers destinataires
selon l’évangéliste
Luc (4, 16-21)»
Puis
s’adressant à tous les partenaires
de la mission ouvrière (membres
des mouvements apostoliques et aumôniers,
prêtres-ouvriers, prêtres
en paroisses populaires, diacres et religieux,
religieuses, laïcs consacrés,
laïcs animateurs pastoraux), les
évêques les invitent à
tenir bon dans l’espérance.
«Nos efforts d’organisation
et de restructurations accaparent parfois
nos préoccupations et nos énergies,
reconnaissent-ils. Comment garder au cœur
la perspective de la mission ?»
L’Église
et le monde ont changé en cinquante
ans. «Mais, conclut le comité
épiscopal, même si les prêtres-ouvriers
sont moins nombreux, même si les
prêtres qui s’engagent dans
cette perspective sont plus rares et le
font différemment de leurs aînés,
cette manière de vivre le ministère
presbytéral garde toujours sa pertinence
au regard de la mission.»
-
Auparavant déjà, dans une
déclaration, datée du 15
janvier 2004, quelques anciens prêtres-ouvriers
(Maurice Combe, Jean Desailly, Jean-Marie
Huret, Jean-Marie Marzio, Jean Olhagaray…)
qui, en leur âme et conscience,
décidèrent en 1954 de ne
pas «se soumettre» à
Rome et de rester au travail, revenaient
sur cet événement. Pour
eux et pour tous ceux qui firent le même
choix qu’eux, une vie nouvelle commença.
«Qu’ils soient organisés
dans un groupe de résistance et
de réflexion ou qu’ils se
retrouvent avec leur solitude et leur
conscience, rappellent-ils, tous vécurent
pendant un an ou deux une véritable
traversée du désert. Deux
en perdirent la vie de désespoir…
Mais
ce rejet qu’ils avaient subi et
non voulu renforçait leur lien
avec la classe ouvrière…
À ces hommes prêtres soucieux
d’être attentifs à
l’Évangile plutôt que
d’exercer une fonction traditionnelle
sacralisée, il apparut que la vie
ouvrière était traversée
par les valeurs évangéliques
révélatrices de valeurs
humaines… Nous avons vécu
cet aller et retour de la pensée
à la vie et de la vie à
la pensée comme une unité
retrouvée, une unité brisée
par tous ceux à qui elle faisait
peur. […] Les années ont
passé. Des prêtres-ouvriers
d’alors, une large majorité
est disparue. Nous n’osons pas nous
dire les porte-parole de ceux-là.
Le rôle de ceux qui restent est
de tenir éveillé leur souvenir
et de tenter d’exprimer la signification
de leur choix et de celui de tous. […]
Après avoir éliminé
tout ressentiment, concluent-ils, nous
pouvons dire que ces années nous
ont apporté la paix.»
-
Une dernière déclaration
enfin, adoptée à l’unanimité
le 22 février dernier par l’équipe
nationale des prêtres-ouvriers,
évoque avec émotion et reconnaissance
tous ceux qui, en 1954, furent contraints
à un choix impossible entre deux
fidélités, la fidélité
à l’Église et la fidélité
à la classe ouvrière. «Ils
sont notre histoire, nos racines à
nous les prêtres-ouvriers d’aujourd’hui,
poursuivent les signataires. Sans eux,
sans leur souffrance, leur espérance,
nous n’existerions pas. En ce mois
de mars 2004, nous voulons les remercier
d’avoir ouvert la voie…
Nous,
les prêtres-ouvriers d’aujourd’hui
avec nos anciens voulons témoigner
que l’homme, celui que la société
rend insignifiant, a toute sa dignité.
Qu’il est aimé de Dieu, de
Jésus Christ, et cela contre tous
les systèmes qui nous réduisent
à n’être que des marchandises.
Nous voulons que ce «signe»
prêtre-ouvrier d’une Église
au service de l’humanité
continue.»
Bernard JOUANNO - 02-03-2004
source: http://www2.la-croix.com
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